Shin Gi Tai est l’unité de l’esprit, de la technique et du corps.
Je voudrais vous parler d’une notion fondamentale en Karate, le Shin Gi Tai, qu’on pourrait traduire par l’unité de la pensée, de la technique et du physique. En effet, quand on parle d’apprentissage du Karate, on ne parle pas que de la technique, mais d’un tout qui englobe la technique, le corps et l’esprit de façon indissociable.
Pour réellement progresser, le Karateka va travailler avec régularité, jour après jour, à la fois la technique, son corps et son esprit. Cela ne veut pas dire que vous devez d’un côté faire des exercices purement technique, puis séparément faire des exercices d’entretien du corps et encore séparément travailler votre mentale, mais plutôt de travailler le tout dans son ensemble.
On peut, et c’est même recommandé, de faire des exercices bien spécifiques pour le corps ou l’esprit, mais la notion de Shin Gi Tai est tout autre et fait le lien permanent entre technique, corps et esprit. Elle signifie plutôt que l’esprit (Shin) s’exprime au travers du corps (Tai) par la technique (Gi). C’est donc en travaillant la technique sans relâche que le Karateka va éduquer à la fois son corps et son esprit.
Shin Gi Tai est l’unité entre l’esprit, la technique et le corps. On parle d’unité car l’un ne peut pas exister sans les deux autres.
Shin
Shin représente l’esprit au sens de la pensée qui nous anime. Le Shin est notre cœur, notre désir, notre « pourquoi ». Pourquoi nous voulons atteindre nos objectifs. Shin représente notre intention. C’est lui qui donne un sens à notre pratique et qui nous permet de suivre un fil directeur. C’est cette force qui nous pousse à avancer dans la vie, qui nous donne la volonté de donner le meilleur de nous-mêmes.
Le Shin n’est pas propre au Karate, mais il est présent dans notre vie de tous les jours. Qu’on s’en rende compte ou pas, c’est la foi qui nous stimule et nous motive en permanence. Le Shin est continuellement présent en nous. Il est présent dans chaque action de notre journée, de notre vie quotidienne, dans le sport et au travail. Bref, toute action sera directement liée au Shin, sans lui nous ne seront rien, puisqu’il constitue notre motivation intérieure, notre fidélité à une cause, notre confiance en nous, en nos capacité etc.
Définir le Shin n’est pas chose simple car c’est un terme vague qui peut signifier plusieurs choses. Le Shin peut se manifester sous divers aspects tels que l’enthousiasme, l’assiduité, la persévérance…
Il peut aussi s’exprimer à différents niveaux, de la simple envie de passer un bon moment à l’envie d’aimer sa vie en générale par exemple. En fait, chaque personne pourra donner sa propre définition car nous ne sommes pas réceptifs aux mêmes choses et de la même manière, nous ne sommes pas réceptifs aux mêmes sources de satisfaction, nous n’avons pas les mêmes passions et nous n’avons pas tous les mêmes ressentis face aux « élans de motivation ».
Le Shin, c’est ça. C’est l’énergie qui nous fait vibrer. C’est la flamme qui brûle en chacun de nous.
Pour vous donner une image, le Shin est comme la batterie d’une voiture. Si la batterie est à plat, on ne peut pas créer l’étincelle pour démarrer, et ce, même si le réservoir d’essence est plein. Nous sommes tous pareils, tout nous semble fade, gris et sans relief lorsque nos batteries sont vides. Nous n’avons plus goût à rien, nous n’arrivons pas à démarrer alors même que nous aurions suffisamment de réserves physique. Il nous manque l’étincelle qui nous fait faire le premier pas, puis le second, puis le suivant comme le fait la bobine d’allumage de notre voiture.
Le Shin, c’est l’étincelle qui vous fait faire le premier pas. Même si vous voulez (et pouvez) gravir des montagnes, quel que soit votre but, il vous faut faire ce premier pas ! Et c’est votre Shin qui va vous aider à y parvenir. La volonté ne suffit pas, il vous faut du désir et du cœur.
En Karate, nous allons développer et entretenir notre Shin en pratiquant car le Shin s’exprime au travers du corps (Tai) par la technique (Gi).
Gi
Gi représente la technique, mais dans le sens de « manière ». Il ne s’agit pas des connaissances techniques que vous avez, mais plutôt de la manière d’exécuter ces techniques. C’est l’unification de la théorie avec la pratique.
Le Gi est l’accomplissement de votre intention (Shin).
Quelle que soit la technique que l’on apprend, notre esprit peut apprendre rapidement la théorie, mais la mise en pratique est plus compliquée. Une fois que l’esprit a compris la théorie il va en faire un but, une intention (Shin) qui sera d’exécuter la technique de la bonne manière. Pour aboutir à la bonne technique, à son exécution parfaite, il va falloir s’entraîner encore et encore jusqu’à ce que le geste effectué devienne identique à notre intention. Gi représente la maîtrise de la technique.
Si le Shin est l’étincelle qui alimente notre batterie, le Gi représente la manière dont nous conduisons notre corps (Tai).
Si vous faites preuve de persévérance dans vos entraînements, le Gi permet à l’intention (Shin) de s’unifier avec la technique effectuée.
Tai
Tai représente le corps, c’est le véhicule sans qui rien ne peut s’exprimer, ni le Shin ni le Gi. Il est le moteur du geste, mais en est également toute la structure. C’est le véhicule tout entier.
Vous devez étudier votre corps en profondeur dans chaque geste, la biomécanique, le placement dans l’espace, votre ressenti,…
L’étude du corps est souvent négligée alors que sans lui, l’intention et la manière ne servent à rien. Vous aurez beau avoir les batteries pleines avec toute la bonne volonté du monde et être un excellent pilote, si vous conduisez une 2CV mal entretenue, vous ne gagnerez pas un grand prix de formule 1.
Le corps est au centre du geste technique, c’est votre véhicule, ne le négligez pas.
Un pilote de formule 1 est à l’écoute de sa voiture. Il le moindre soubresaut, la moindre baisse de régime, le moindre cliquetis mécanique,…Vous devez être pareil avec votre corps afin d’harmoniser vos gestes, de ressentir la connexion de vos articulations, de travailler votre posture, votre équilibre, de prendre conscience de vos appuis, de vos déplacements, de l’espace dans lequel vous évoluez.
Pratiquer pour pratiquer ne suffit pas, il faut être pleinement présent et à l’écoute de son corps pour que l’intention et la manière puissent pleinement s’exprimer. Et ne pensez pas que l’intention ou la manière soit plus important que le corps, ils sont tous les trois une unité. Chacun dépendant pleinement de l’autre. Ecouter votre corps est essentiel afin de mieux le comprendre. Ainsi, la maîtrise de votre corps par l’entrainement vous permettra d’exprimer pleinement votre intention dans le geste technique.
Shin Gi Tai : Un tout indissociable
Avec Shin Gi Tai, la boucle est bouclée et forme un tout qui tourne sans cesse sur lui-même. L’esprit s’exprime au travers du corps par la technique, le corps permet à la technique de s’unifier avec l’intention et la manière permet au corps d’être la représentation visible de la pensée.
Si vous négligez votre corps (Tai), votre technique sera dégradée et votre motivation diminuera. Si vous ne travaillez pas votre technique (Gi) régulièrement, votre corps et votre intention ne suffiront pas à faire un geste parfait. Si vous négligez votre esprit (Shin) et n’entretenez pas la flamme qui vous anime, vous serez démotivé et finirez par ne plus vous soucier ni de votre technique, ni de votre corps.
Comme vous le voyez Shin Gi Tai forme un tout qui doit être entretenu avec persévérance.
Je vous ai préparé une vidéo dans laquelle je vous parle de l’importance de Shin Gi Tai.
Voilà, j’espère que cet article, vous a plus et qu’il vous permettra d’avoir une réflexion profonde sur votre entrainement et vous fera progresser.
A bientôt,
Bruno
Votre avis m’intéresse, laissez moi un commentaire, en répondant par exemple à ces questions :
- Que représente pour vous Shin Gi Tai ?
- Pensez vous que la pratique du Karate fait évoluer à la fois le corps et l’esprit ?
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4 commentaires
Merci Bruno !
Un explication de Shin Gi Tai et des mots japonais employes qui vient du judo et plus anciennement du jujitsu probablement :
http://judosaintgermaindupuch33750.e-monsite.com/pages/progression-judo.html
Ou un auteur japonisant nous explique que :
– shin : ce qui est au centre de l’emotion, de l’intention.
– gi : le caractere »gi » se lit aussi « waza » (exemple keri waza technique de jambes),
– tai : avant 1946 signifie les « os correctement alignés »
J’ajouterai que le karate okinawaien et le jujitsu ont un usage tres particulier / savant de la biomécanique osseuse.
A mon avis, il vaut mieux conceptualiser avec des mots français car si l’on utilise des mots traduits on peut réduire leur pluralité de sens a nos points de vue personnels / culturels et on ferme une porte vers des signifiants qui nous sont étrangers.
Par exemple, le mot « uke » que l’on traduit par « blocage » (ex « age uke ») ou « celui est attaqué » ( « uke » et son pote « tori »). Je connais pas le japonais mais pour moi « uke » veut dire « recevoir ». La notion de bloquer fait penser à arrêter en force. Recevoir est plus neutre et peut signifier « absorber », »dévier », etc …C’est ainsi que je vois une vidéo ou un maitre okinawaien « engueule » un occidental en lui disant « ton uke est mauvais »…A l’évidence il veut dire autre chose que d’arreter. Ensuite il lui dit tu ne fais pas une compétition, tu perds car tu cherche à marquer des points »… Un autre « japonais » dit quelque chose de semblable « il n’y a pas d’attaque »… »on cherche a ne pas perdre »….ce qui eclaire quelques propos de Me Funakoshi mais nous semble conceptuellement etranger dans un cadre sportif ou le coatch va inciter a marquer des points.
Cet exemple autour du mot « uke » m’incite a penser que le vieux karate est de la self-defense violente, respectant le principe de la légitime défense qui veut que la riposte soit immédiate et non pas 5 mn plus tard ( ce qui la qualifie de vengeance).
Peut-etre que cela a consiste à créer des automatiques, des arcs reflexes, pour s’engouffrer dans les failles d’attaques probables. L’entrainement devient alors une forme de dressage de l’esprit et du corps pour qu’il devienne comme un piège a loup qui s’abat sur la patte qui s’approche trop.
A mon avis : il y a les techniques et le corps qui doit se transformer (par exemple les muscles pour faire yokogeri ) , quand à l’esprit je ne sais pas. Certain parleront de zen et de Myamotomusashi, mais le plus souvent il répond a ce qu’il est habituer à recevoir et trop de techniques et la riposte devient brouillé. C’est une experience a faire quand on fait du karate : pratiquer deux mois la boxe française. Les coups autorisés ne sont plus les memes.
Le dernier point sur l’esprit : c’est que personne n’envisage le fait que les exercices soient fait avec des visualisations précises. Les visualisations ont un effet réel sur le cerveau et l’esprit controle la matiere (penser a une belle fille bronze en string) Je me souvient d’un jeune okinawaien qui faisait un kata a une soirée festive. Ce qui m’a surpris c’est l’energie dégagé mais s’est yeux : il avait l’air halluciné, amok.
Sensei et, permettez moi, AMI Bruno, j’ habite a Montreal (Belle Province!) , j’ai 73 ans, les arts martiaux font partie de ma vie spirituelle, et j’admire votre vocation pedagogique dans ce domaine. J’ envisage aller en France prochainement et vous visiter a Langres. J ‘ai pratique il y a 30 ans le style Shotokan avec Sensei Philippe Lecomte de Fleuris, a Besancon , avez vous de ses nouvelles? Bien amicalement :GERMAN DA COSTA MORALES , 3535 AV. PAPINEAU app.601 Montreal, QC, H2K 4J9, Canada
Bonjour German,
Merci pour ton admiration, ça me touche. Je n’ai pas de nouvelles de Philippe à Besançon car je ne connais pas.
Si tu viens par chez nous, ce serait avec plaisir que je t’accueillerai dans notre magnifique vile de Langres. Préviens moi assez tôt et je te ferai visiter la ville et on parlera Karate 🙂
Amicalement,
Bruno