Kiba-dachi, l’art Roman du Karaté :
Après ZenKutsu Dachi et Kokutsu Dachi, Kiba dachi est la troisième position fondamentale en Karaté, mais, cette fois ci le poids du corps n’est pas sur la jambe avant ou sur la jambe arrière, mais également réparti entre les deux et de façon latéral.
Kiba Dachi est la position du cavalier ( on l’appelle parfois : Tekki – Cavalier de fer) car elle donne l’impression d’un cavalier assis sur son cheval.
C’est une position très simple et qui pourtant est souvent redoutée de beaucoup de pratiquants car elle fait mal aux cuisses 😉
Mais rassurez vous, nous allons étudier ensemble comment limiter au maximum ces tensions dans les cuisses.
On parle trop souvent Kiba Dachi comme une position de « force » où il est normal d’avoir mal et où tout ce passe dans la tête. S’il est vrai que tenir Kiba Dachi pendant un certains temps est problématique et douloureux, c’est également vrai pour les autres positions. Mais comme Kiba Dachi, fait un peu penser à l’exercice de la chaise on pense souvent qu’il est normal d’avoir mal partout.
Or ce n’est pas vrai, vous devez faire Kiba Dachi en étant le plus détendu possible. Vous ne devez pas utiliser votre musculature pour tenir en équilibre, mais placer votre corps de manière à ce qu’il soit en appuis sur les pieds sans avoir besoin de lutter contre un quelconque déséquilibre.
La voute en plein cintre :
Je pense qu’il faut imaginer le corps un peu comme un édifice complet : Lorsque je fait Kiba Dachi, je imagine mon buste posé sur un socle solide formé par mon bassin et mes jambes.
Le problème est comment rendre le socle solide en utilisant le minimum de force musculaire, comment dois je me placer pour que les forces engendrées par le poids de mon corps descendent dans mes jambes à la verticale et ne soit pas dispersées dans d’autres directions.
Réponse : Rappelez vous de vos cours d’histoire et du principe fondamentale de l’art Roman et de la voute en plein cintre. Et bien, pour moi les jambes et le bassin dans Kiba Dachi doivent former une voute en plein cintre.
Avant de continuer, je voudrais vous montrer une petite animation que j’ai déniché sur un site d’architecture et qui résume très bien ce que j’essaie d’expliquer :
Il vous suffit cliquer ici ou sur l’image ci-contre pour lancer l’animation.
En fait vous devez être comme une statue sur un arc de triomphe 😉
Si on fait le parallèle avec notre position Kiba Dachi, nous dirons que le bassin représente la clé de voûte, et les jambes jusqu’au pieds, la voûte elle même. Il faut donc essayer de former la voûte la plus parfaite possible pour que les forces descendent dans les pieds à la verticale.
Si nous comparons avec l’animation, le problème se situait au niveau des jointures des claveaux. Dans notre cas, ce seront les articulations qui poserons un problème et c’est là que la musculature va un peu travailler afin de réorienter les forces en directions du segment suivant :
> au niveau de la hanche, la force verticale du haut du corps doit se rediriger en direction des fémurs
> au niveau des genoux, la force doit se rediriger en direction des tibias
> et au niveau des chevilles la force doit se rediriger verticalement en direction de la voute plantaire.
Donc quand on vous regarde de face, vos jambes et votre bassin doivent former une voute.
Ensuite, vous maintenez une légère pression au niveau des adducteurs pour ne pas laisser les forces se diriger vers l’extérieur à chaque articulation.
Si votre voute est parfaite, vous n’avez que très peu de tension à maintenir pour que les forces descendent dans la bonne direction.
Pensez que Kiba Dachi est la position du cavalier, imaginez le cheval entre vos jambes et vos pieds dans les étriers et vous devriez former une belle voute.
Kiba Dachi de profil :
Si nous regardons de profil, c’est une autre histoire. Là, la stabilité de la position est conservé si le centre de gravité tombe sur un axe passant par les plantes de pieds. En fait à l’intérieur du polygone de sustentation (surface délimitée par vos pieds!)
Le haut du corps est parfaitement droit et posé sur le bassin qui reste à plat et les jambes sont pliées et forme un ensemble solide.
Les mollets et les quadriceps sont légèrement contractés pour maintenir la position. C’est cette contraction qui finit par créer des douleurs si la position est maintenue trop longtemps.
Mais si en plus, votre centre de gravité est légèrement décalé, vous perdez l’équilibre naturel et devrez en plus lutter contre ce déséquilibre et contractez encore plus vos jambes :
S’il est trop vers l’avant, vous devrez solliciter vos mollets pour maintenir l’équilibre et s’il est vers l’arrière, ce sont vos quadriceps qui devront maintenir l’équilibre.
Il faut donc veiller au bon placement de ce centre de gravité pour n’avoir que la force verticale de votre poids à supporter et non des forces horizontales dû aux déséquilibres.
Donc oui Kiba Dachi fait travailler les cuisses, mais si vous êtes parfaitement placé dans les deux plans comme nous venons de le voir, vous aurez déjà considérablement diminué ces contractions.
Les pieds doivent être parallèles :
Dans Kiba Dachi, contrairement à Shiko Dachi (la position des Sumotori!) les pieds sont parallèles.
Cela semble poser un sérieux problèmes aux niveaux des genoux. En effet, les genoux sont orientés vers l’extérieur alors que les pieds, étant parallèles, sont orientés vers l’intérieur.
Or, nous en avions déjà parlé dans l’étude de Zenkutsu Dachi, le genou n’a pas la fonction de rotation. Donc cette différence d’orientation entre le genou et le pied risque créer des tensions plus ou moins importante dans le genou.
Rotation du genou : On dit toujours que le genou n’a pas cette fonction. Cependant, la rotation du genou est quand même possible mais modérément et seulement en flexion. En fait lorsque le genou est fléchi à 90°, il est capable de rotation de l’ordre de 20° en interne et 30° en externe. Or dans Kiba Dachi, nous sommes à peut près dans ce cas de figure, les genoux sont fléchis et les pieds rentrent à l’intérieur (rotation interne du genou).
Donc cette différence d’orientation, si elle est bien contrôlé, n’est pas spécialement mauvaise. Par contre où il faut faire attention, c’est dans l’orientation des forces. Il faudra bien garder le bassin à plat, ouvrir les cuisses au maximum tout en conservant une tension dans les adducteurs pour ne pas laisser les forces partirent vers l’extérieur et créer des tensions dans les genoux et les chevilles.
Il faut que vous ayez la sensation de « presser » vos pieds dans le sol. Attention la pression se fait verticalement, n’exagérez pas la flexion de la cheville en poussant vers l’extérieur. Vous devez sentir vos appuis bien sous les pieds et non sur les bords externes.
Tout ceci n’est pas très facile à expliquer par écrit, j’essaierai de vous éclairer dans la vidéo.
Shiko Dachi ou Kiba Dachi :
Je rappelle que Shiko Dachi est la position du Sumotori. C’est sensiblement la même position que Kiba Dachi mais les pieds sont ouverts au lieu d’être parallèles.
J’entends souvent dire qu’il vaut mieux faire Shiko Dachi que Kiba Dachi, mais c’est une erreur car en fait chaque position n’a pas la même utilité :
> Kiba Dachi est essentiellement fait pour se déplacer et développer de la force sur un côté ou l’autre, pour faire Yoko Geri par exemple.
> Alors que Shiko Dachi est fait pour développer de la force vers l’avant en poussant sur les deux jambes et non latéralement. Les lutteurs de Sumo se font face 😉
Donc oui en Karaté, nous avons des Kiba Dachi est non ce n’est pas une position mauvaise physiologiquement mais à condition de bien la maîtriser et d’y aller progressivement.
Ne descendez pas trop bas dans un premier temps si vous n’arrivez pas à maintenir votre buste droit, votre bassin à plat et à canaliser les forces verticalement. Faites ça progressivement.
Mais de toute façon, ce n’est pas une position exagérément basse : Rappelez vous, vous devez former une voute et non un rectangle avec les cuisses parallèles au sol. C’est beau, mais ce n’est pas Kiba Dachi.
Je crois que comme pour toute position, l’important, c’est l’harmonie : Il ne faut être ni trop bas, ni trop haut, ni trop écarté, ni trop serré et surtout que le haut du corps soit verticale et transmette l’énergie verticalement dans le bassin.
Voilà, je ne vais pas m’étendre plus sur cette position qui fait souvent polémique. Je vous invite plutôt à me rejoindre sur la vidéo. Je vous promet une séance de Kiba Dachi, sans douleurs 😉
N’oubliez pas vos échauffements en téléchargeant l’ABC des échauffements.
Voilà j’espère que les exercices vous ont plus et que vous sentez un peu mieux votre Kiba Dachi.
Conseils : Étirez vos quadriceps doucement pendant 1 minute chacun et je vous conseille demain ou après demain de faire une séance complète d’étirements spécifiques pour les hanches.
A bientôt,Bruno
"Comment réussir vos passages de grade"
6 commentaires
juste une petite correction a ce très intéressant article. . le shiko dachi n’est pas a l’usage exclusif du sumo mais il appartient pleinement au patrimoine technique du karate.
on le retrouve en shito-ryu et dans les styles d’okinawa.
Bonjour Save-Ryu,
Tu as entièrement raison, Shiko Dachi fait partie également du patrimoine du Karatéka, et je n’ai pas prétendu qu’elle était à l’usage exclusif du sumo.
C’est juste que « la position du Sumotori », c’est le nom qu’on lui donne, comme on donne le nom de « position du cavalier » à Kiba-Dachi. Pourtant cette dernière n’est pas à l’usage exclusif des cavaliers 😉
Mais tu as eu raison de le préciser car mon article aurait pu préter à confusion.
Merci.
Bonjour ,
a ma connaissance , les moines de shaolin descendent si bas surtout par soucis de mimétisme. Presque toutes leurs techniques découlent de l’étude du comportement animalier et sa copie. En dehors de ces techniques mimétiques, j’ai remarqué qu’ils ne descendaient pas si bas que ça. Par contre, eux s’entrainent a rester dans cette position extrêmement longtemps. Le moment du repas par exemple est un bon prétexte pour rester en kiba-dachi sans pour autant perdre de temps. (Ils sont fou ces shaolins ! )
Quand a moi, je sent toujours une désagréable tension dans les chevilles dans cette position et même lorsque je contre musculairement la pression latéral induite par le poids du corps ( je ne pense d’ailleurs pas qu’il faille le faire, c’est épuisant !). Est-ce un problème de souplesse/musculation ou de mauvais positionnement ?
Bonjour a tous
Un point de vue important sur le classement du Kiba d’achi
A mon sens c’est la posture n°1 ,
La base de diverse position
– dans Kiba il y l’intervalle du zen kustu du kokutsu du fudo etc..
– Le positionnement du corps centré ni sur l’avant ni sur l’arrière l’un ou l’autre provoquera immédiatement un déséquilibre avant et arrière qui nous oblige à un placement automatique
– il suffit de pivoter sur le Kochi du pied droit ou du pied gauche et l’on retrouve le kokutsu parfait
– il suffit de pivoter sur le talon du pied droit ou du pied gauche et l’on retrouve le zen parfait (intervalle pied avant pied arrière distance pied avant pied arrière)
Essayez !!!
Bonne pratique
Bonjour Dominique,
Effectivement ton analyse place KibaDachi en 1ère position. Cependant, j’ai noté 3ème position car c’est en générale la 3ème que l’on apprend mais en réalité, pour moi, il n’y a pas de « classement » possible car chaque position a un rôles différents : ZenKutsu pour l’attaque, Kokutsu pour la défense, Kibadachi pour les techniques sur le côté (Même si on peut bien sur les utiliser toutes en défense, en attaque ou sur les côté).
Partant de là, on ne peut pas classer les positions par ordre de priorité, mais ça reste mon avis.
A+
Bruno
Bonjour Bruno,
Intéressante comparaison entre la voute, sa clé, et » Kiba Dachi », tu as raison d’insister sur les précautions à prendre,quand à la rotule, c’est très bien détaillé.
Bonne continuation, et bonne journée.
Marc.